La banqueroute n’empêche pas de soumissionner

Ni l’article 45 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, qui définit les interdictions de soumissionner obligatoires et générales, ni l’article 48 de cette ordonnance, qui énumère les interdictions de soumissionner facultatives, ni aucun autre texte ne prévoient que la condamnation pour banqueroute constitue un motif d’exclusion de la procédure de passation des marchés publics (CE, 31 octobre 2017, n° 410496).


Conséquences d’une indemnité de résiliation pour motif d’intérêt général manifestement disproportionnée

Après avoir rappelé, d’une part, qu’en vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs, la personne publique cocontractante peut toujours, pour un motif d’intérêt général, résilier unilatéralement un tel contrat, sous réserve des droits à indemnité de son cocontractant et d’autre part, que l’étendue et les modalités de cette indemnisation peuvent être déterminées par les stipulations contractuelles, le Conseil d’Etat énonce que « l’interdiction faite aux personnes publiques de consentir des libéralités fait toutefois obstacle à ce que ces stipulations prévoient une indemnité de résiliation qui serait, au détriment de la personne publique, manifestement disproportionnée au montant du préjudice subi par le cocontractant du fait de cette résiliation ».

Il en déduit que si, dans le cadre d’un litige indemnitaire, l’une des parties ou le juge soulève, avant la clôture de l’instruction, un moyen tiré de l’illicéité de la clause du contrat relative aux modalités d’indemnisation du cocontractant en cas de résiliation anticipée, il appartient à ce dernier de demander au juge la condamnation de la personne publique à l’indemniser du préjudice qu’il estime avoir subi du fait de la résiliation du contrat sur le fondement des règles générales applicables, dans le silence du contrat, à l’indemnisation du cocontractant en cas de résiliation du contrat pour un motif d’intérêt général (CE, 3 mars 2017, n° 392446).

Autrement dit, en cas de clause manifestement disproportionnée, le cocontractant de l’administration est indemnisé non pas sur le fondement de la clause litigieuse mais sur le fondement des règles générales applicables.


A propos de la responsabilité quasi délictuelle du maître d’œuvre

Rappel : Dans le cadre d’un contentieux tendant au règlement d’un marché relatif à des travaux publics, le titulaire du marché peut rechercher, outre la responsabilité contractuelle du maître d’ouvrage, la responsabilité quasi-délictuelle des autres participants à la même opération de construction avec lesquels il n’est lié par aucun contrat de droit privé (CE, 5 mars 2017, n° 396430, Sociétés Eurovia Champagne-Ardenne et Colas Est).


Procédure adaptée : Pas d’obligation de communiquer le nom de l’attributaire

Il résulte de la combinaison des articles 99 et 101 du décret du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics qu’en cas de procédure adaptée, dès qu’il décide de rejeter une offre l’acheteur doit notifier ce rejet au soumissionnaire concerné, sans être tenu de lui notifier la décision d’attribution (CE, 31 octobre 2017, n° 410772, Société MB Terrassements Bâtiments).


Tant que le marché n’est pas signé, un référé précontractuel est recevable

Le Conseil d’Etat a rappelé que les articles L. L. 551-1 et L. 551-5 du code de justice administrative n’impliquent pas que les personnes ayant intérêt à conclure le contrat et qui s’estiment susceptibles d’être lésées par des manquements aux règles de publicité et de mise en concurrence soient tenues de saisir le juge du référé précontractuel dans un délai déterminé à compter du moment où elles ont connaissance de ces manquements.

Il rappelle que la seule limite à la recevabilité du référé précontractuel est la signature du marché.

Autrement dit, tant qu’une collectivité n’a pas conclu le marché, en raison par exemple du retard pris dans la réception des pièces ou ne l’a pas notifié, elle s’expose à un référé précontractuel.


Pas d’indemnisation pour le candidat évincé en cas de nullité du contrat

La CAA de Bordeaux a considéré qu’un candidat évincé ne saurait être indemnisé du préjudice subi du fait de son éviction irrégulière lorsque le contrat est nul. Elle estime que quand bien même il aurait été l’attributaire, il n’aurait pu en être titulaire compte tenu de sa nullité (CAA Bordeaux, 17 juillet 2017, n° 16BX03518).

 


Pas de remise en cause de la compétence de la CAO par les délégations des assemblées délibérantes, prises en application de l’article L. 2122-22-4° du code général des collectivités territoriales

Le ministre de l’action et des comptes publics a rappelé que la CAO est la seule compétente pour attribuer les marchés publics passés obligatoirement selon une procédure formalisée et pour autoriser la signature des avenants d’un montant supérieur à 5 % du montant initial à un marché public qui a été soumis à la commission.

La compétence de la CAO est à apprécier selon les modalités de calcul des articles 20 à 23 du décret n° 2016-360 du 25 mars relatif aux marchés publics.

En dehors de cette hypothèse de compétence réservée de la CAO, si l’assemblée délibérante décide de déléguer sur le fondement de l’article L. 2122-22-4° du CGCT en fonction d’un seuil, il lui appartient de déterminer les modalités de calcul de ce seuil.

Tant que ces modalités ne remettent pas en cause les compétences de la CAO précitées, l’assemblée délibérante est libre de déterminer les modalités de calcul comme elle l’entend, sous réserve que la délibération soit suffisamment précise (Rép. min. n° 1027 : JOAN Q 2 janvier 2018, p. 52).


Vote du comité de sélection

Chaque fois que le comité de sélection, qui a la qualité de jury de concours, statue sur une candidature individuelle, soit pour décider ou non de procéder à l’audition du candidat, soit pour statuer sur sa candidature à l’issue de son audition, une éventuelle abstention doit être regardée comme traduisant un vote défavorable.

A noter que dans tous les cas, le président a voix prépondérante en cas de partage des voix (CE, 27 septembre 2017, n° 404475).


A propos de la délégation donnée à l’exécutif dans le cadre des marchés publics

Le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales a rappelé dans une réponse ministérielle du 10 juillet 2018 que « l’article L. 2122-22, 4° du code général des collectivités territoriales ne prévoit pas d’obligation au conseil municipal de déléguer la totalité de ses pouvoirs en matière de marchés publics et d’accords-cadres. Il s’agit donc d’une faculté. Ainsi, l’assemblée délibérante dispose de la faculté de conserver une partie de ses pouvoirs, y compris concernant les avenants ; elle peut donc choisir d’exclure les avenants de sa délégation. En toute hypothèse, la délibération portant délégation au maire doit définir les limites de cette délégation avec une précision suffisant » (Rép. min. n° 7794 : JOAN 10 juillet 2018, p. 6015).


Concession et détermination de ses besoins par l’acheteur public

Le Conseil d’Etat estime qu’un acheteur public doit, en vertu des articles 17 et 24 de l’ordonnance du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession et du décret du 1er février 2016, préciser la nature et l’étendue de ses besoins, faute de quoi la procédure encourt l’annulation.

Dans une telle hypothèse, le juge des référés précontractuels peut considérer que la définition large ou imprécise des besoins est un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence.

En l’espèce, la ville du Havre a vu la procédure de passation relative au réseau de chaleur du quartier de Caucriauville qu’elle avait lancée annulée, faute de précision suffisante des documents de la consultation sur le périmètre de la concession, relevant que « compte tenu des imprécisions sur le périmètre de la concession, la commune ne pouvait être regardée, en l’espèce, comme ayant suffisamment déterminé l’étendue de ses besoins ; qu’il a également relevé que, si le fait de fixer seulement une durée maximale ne constitue pas, à lui seul, un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence, il traduisait en l’espèce, en raison de l’incertitude sur le montant des investissements à réaliser et à amortir qui résultait par ailleurs des imprécisions sur le périmètre de la concession, une insuffisante détermination des besoins de la commune » (CE, 15 novembre 2017, n° 412644, Commune du Havre).