Précisions sur la notion d’emploi équivalent en cas de reclassement d’un agent public à l’issue de son congé maternité

Aux termes du 5° de l’article 34 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d’Etat, « le fonctionnaire en activité a droit : a) au congé pour maternité, ou pour adoption, avec traitement, d’une durée égale à celle prévue par la législation sur la sécurité sociale. […] b) Au congé de paternité et d’accueil de l’enfant, avec traitement, d’une durée de onze jours consécutifs ». A l’expiration de ces congés, le fonctionnaire est réaffecté de plein droit dans son ancien emploi. Dans le cas où celui-ci ne peut lui être proposé, le fonctionnaire est affecté dans un emploi équivalent, le plus proche de son dernier lieu de travail. Par un arrêt du 14 septembre 2016, le Conseil d’Etat a jugé qu’un emploi avec des responsabilités d’encadrement substantiellement accrues ne pouvait être regardé commun « emploi équivalent » à celui précédemment occupé par l’agent public (CE 14 septembre 2016, Mme B., n° 388519).


Les pouvoirs d’une administration saisie d’une demande d’autorisation de cumul d’activités

Si les fonctionnaires doivent consacrer l’intégralité de leur activité professionnelle aux tâches confiées par l’administration, ils peuvent néanmoins, par exception, être autorisés à cumuler leur emploi avec une autre activité (cf. l’article 25 septies de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983). Il en va de même pour les agents non titulaires. L’autorisation de cumul d’activités ne peut être accordée qu’après avoir vérifié la compatibilité de l’activité avec les fonctions de l’agent au regard, notamment, d’une demande écrite renseignant la durée de l’activité envisagée.

Par un arrêt du 27 juillet 2016, le Conseil d’Etat a rappelé que la durée de l’activité est un élément substantiel nécessaire à l’examen de la compatibilité de l’activité envisagée avec les fonctions confiées à l’agent. Il a aussi et surtout précisé que l’autorité appelée à se prononcer sur une demande d’autorisation de cumul peut soit accorder celle-ci pour une durée plus courte que celle qui était demandée, soit lui fixer un terme alors qu’elle était sollicitée pour une durée indéterminée (CE 27 juillet 2016, M. C. D., n°395292).


Droit individuel à la formation et projet personnel

Par un arrêt du 22 juillet 2016, le Conseil d’Etat a jugé que si le droit individuel à la formation peut porter sur des actions de formation continue portant sur l’adaptation des fonctionnaires à l’évolution prévisible des métiers, le développement de leurs qualifications ou l’acquisition de nouvelles qualifications ainsi que sur la formation de préparation aux examens et concours administratifs, la réalisation de bilans de compétences ou la validation des acquis de leur expérience, il ne peut porter, en revanche, sur des actions de formation en vue de satisfaire à des projets personnels (CE 22 juillet 2016, M. B., n°397345).


Reclassement de l’agent non titulaire en CDI en cas d’inaptitude

Le Conseil d’Etat réaffirme une solution dégagée en 2002 pour les salariés et la transpose aux agents non titulaires : il résulte d’un principe général du droit dont s’inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi, que les règles statutaires applicables dans ce cas au fonctionnaire, que lorsqu’il a été médicalement constaté qu’un agent non titulaire se trouve de manière définitive atteint d’une inaptitude physique à occuper son emploi, il appartient à l’employeur public de le reclasser dans un autre emploi et, en cas d’impossibilité, de prononcer son licenciement. Ce principe est applicable en particulier aux agents contractuels de droit public et dans le cas où un tel agent est employé dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée, cette caractéristique de son contrat doit être maintenue, sans que puissent y faire obstacle les dispositions applicables le cas échéant au recrutement des agents contractuels (CE 13 juin 2013, n°387.373).


Une inspection peut suffire à fonder le licenciement pour insuffisance professionnelle d’un enseignant

Le Conseil d’Etat a estimé que, même sans avoir jamais fait l’objet d’une évaluation, un enseignant peut être licencié pour insuffisance professionnelle constatée à l’occasion d’une inspection portant sur son activité, dès lors que cette activité est examinée dans la durée. En l’espèce, le licenciement faisait suite à une inspection pédagogique à laquelle l’enseignant non titulaire s’était opposé, alors qu’il y était soumis pour la première fois en 35 ans de service (CE 1er juin 2016, n°392.621).


Licenciement pour insuffisance professionnelle fondée sur les carences managériale

Le Conseil d’Etat a jugé qu’un directeur chargé de la culture au sein d’un EPCI pouvait être licencié pour insuffisance professionnelle fondée sur ses carences managériales, alors même qu’il avait exercé des activités de service public en matière d’action culturelle pendant 25 ans et que ses compétences techniques n’étaient pas remises en cause : « la fonction de directeur de la culture […], de nature essentiellement managériale, ainsi que la mission de réorganisation et de rationalisation du service culturel qui lui était également confiée exigeait des qualités professionnelles de gestion, de communication, de dialogue et de conduite du changement, ainsi d’ailleurs que sa fiche de poste le mentionnait » (CE 20 mai 2016, Communauté urbaine de Strasbourg, n°387.105).


Une nouvelle loi relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires

La loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires modifie bon nombre de dispositions pour les fonctionnaires des trois fonctions publiques, soit 5,5 millions de personnes intéressées.

Cette loi constitue la plus importante réforme du titre 1er du statut général de la fonction publique depuis la loi du 13 juillet 1983. Elle vise à intégrer le respect des valeurs essentielles de la fonction publique et à prévenir les conflits d’intérêts, lesquels sont définis comme « toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif de ses fonctions » (Titre I de la loi). Elle tend aussi à moderniser les obligations et les garanties fondamentales accordées aux agents (Titre II). A titre d’exemple, elle étend la protection fonctionnelle aux proches d’un agent public lorsqu’ils sont victimes d’agressions du fait des fonctions de celui-ci ou pour engager une action contre les agresseurs de l’agent. De même, il est prévu que lorsqu’une administration a pris connaissance de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits passibles de sanctions, elle ne peut engager une action disciplinaire au-delà d’un délai de trois ans. La loi vise aussi à assurer l’exemplarité des employeurs publics en améliorant la situation des agents contractuels et le dialogue social dans la fonction publique (Titre III). Elle a également pour but d’élargir le champ des compétences des centres de gestion et du Centre national de la fonction publique territoriale (Titre V).


Une sanction trop faible doit être annulée

On a souvent tendance à considérer que le contrôle de proportionnalité exercé par le juge à propos des sanctions infligées à des agents publics ne l’amène à annuler que celles d’entre elles qui sont trop lourdes par rapport aux fautes commises. Il n’en est rien comme en atteste la présente affaire mettant en cause la décision du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) de n’infliger qu’un blâme à un enseignant-chercheur. Le Conseil d’Etat a considéré que « eu égard à la gravité des manquements relevés aux obligations des enseignants-chercheurs en ce qui concerne la délivrance des diplômes, alors même que des dysfonctionnements peuvent être imputés à l’université Lumière Lyon II, le CNESER, en n’infligeant à M. B. qu’une sanction du niveau le plus faible de celles susceptibles d’être infligées à un enseignant-chercheur, a retenu une sanction hors de proportion avec les fautes commises ». Par suite, la Haute juridiction a jugé que la décision du CNESER devait être annulée (CE 6 avril 2016, Université Lumière Lyon II, n°389.821).


Demande de licenciement d’un salarié protégé pour absences prolongées

Le Conseil d’Etat confirme et précise sa jurisprudence Maube (21 octobre 1996, n°111.961) en jugeant que si la demande de licenciement est fondée sur des absences prolongées et répétées pour maladie du salarié protégé, il incombe à l’inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir si, eu égard à la nature des fonctions de l’intéressé et aux règles applicables à son contrat, ses absences apportent au fonctionnement de l’entreprise des perturbations suffisamment graves que l’employeur ne peut pallier par des mesures provisoires et qui sont dès lors de nature à justifier le licenciement en vue de son remplacement définitif par le recrutement d’un autre salarié. L’employeur n’est pas tenu, dans ce cas, de rechercher un poste de reclassement (9 mars 2016, 378.129).


L’articulation entre les différents congés maladie dont peut bénéficier un fonctionnaire victime d’un accident de service ou d’une maladie imputable au service et le traitement qui doit lui être versé

Le 18 décembre 2015, le Conseil d’Etat a rendu un arrêt (Mme A., n°374.194) qui concerne l’hypothèse d’un fonctionnaire qui a été victime d’un accident de service ou dont la maladie a été contractée pendant le service ou aggravée par l’exercice de ses fonctions ou qui relèvent de l’une des causes exceptionnelles visées par l’article L. 27 du code des pensions civiles et militaires

Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat énonce deux cas de figure :

Premier cas de figure :

Lorsqu’il ne peut reprendre ses fonctions dans les douze mois suivant son placement en congé maladie ordinaire et qu’il ne peut pas bénéficier d’un placement en congé longue maladie ou longue durée, le fonctionnaire doit bénéficier de l’adaptation de son poste.

Si son poste ne peut pas être adapté, il doit être mis à même de demander son reclassement dans un autre corps ou cadre d’emplois, à la condition qu’il ait été déclaré apte à occuper un tel poste.

Si le fonctionnaire ne sollicite pas son reclassement ou si aucun reclassement ne peut avoir lieu, l’administration peut le placer en retraite par anticipation ;

En tout état de cause, elle devra maintenir le versement de l’intégralité de son traitement soit jusqu’à sa mise à la retraite soit jusqu’à la reprise du service.

Second cas de figure :

S’il en remplit les conditions, le fonctionnaire qui ne peut reprendre ses fonctions dans les douze mois suivant son placement en congé maladie ordinaire peut être placé soit en congé longue maladie ou longue durée par l’administration, ce qui a des conséquences sur son traitement :

  • en cas de placement en congé longue maladie, l’administration devra maintenir son plein traitement pendant trois années ;
  • en cas de placement en congé longue durée, l’administration devra maintenir son plein traitement pendant cinq années et lui versera ensuite un demi-traitement pendant trois ans ;

S’il ne peut reprendre ses fonctions et être reclassé sur un autre poste ou s’il est dans l’impossibilité permanente de reprendre ses fonctions du faits de sa maladie à l’issue de trois ans en cas de placement en congé longue maladie ou de huit ans en cas de placement en congé longue durée, l’administration peut prononcer sa mise d’office à la retraite.

Dans une telle hypothèse, le fonctionnaire conserve le versement jusqu’à sa mise à la retraite :

  • de son plein traitement s’il est placé en congé longue maladie ;
  • de son demi-traitement s’il est placé en congé longue durée.