A propos de la concession provisoire sans publicité ni mise en concurrence

Dans un arrêt du 5 février 2018 (n° 416581), le Conseil d’Etat précise, d’une part, que l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 s’applique aux contrats relatifs à l’exploitation de mobiliers urbains et les conditions dans lesquelles une personne publique peut recourir à une procédure sans publicité ni mise en concurrence et encadre cette pratique.

Il retient qu’ « en cas d’urgence résultant de l’impossibilité dans laquelle se trouve la personne publique, indépendamment de sa volonté, de continuer à faire assurer le service par son cocontractant ou de l’assurer elle-même, elle peut, lorsque l’exige un motif d’intérêt général tenant à la continuité du service public conclure, à titre provisoire, un nouveau contrat de concession de service sans respecter au préalable les règles de publicité prescrites ».

Néanmoins, la durée de ce contrat ne saurait excéder celle requise pour mettre en œuvre une procédure de publicité et de mise en concurrence, si la personne publique entend poursuivre l’exécution de la concession de service ou, au cas contraire, lorsqu’elle a la faculté de le faire, pour organiser les conditions de sa reprise en régie ou pour en redéfinir la consistance.


Précisions sur les biens de retour

Pour le Conseil d’Etat, constitue un bien de retour le bien acquis par le concessionnaire antérieurement à la passation de la concession de service public et qu’il a, en acceptant de conclure la convention, affecté au fonctionnement du service public et qui est nécessaire à celui-ci (CE, 29 juin 2018, n° 402251).


Soldes du marché et intérêts moratoires

Il résulte des dispositions de l’article 2 du décret du 29 mars 2013 relatif à la lutte contre les retards de paiement dans les contrats de la commande publique que « lorsqu’un décompte général fait l’objet d’une réclamation par le cocontractant, le délai de paiement du solde doit être regardé comme ne commençant à courir qu’à compter de la réception de cette réclamation par le maître d’ouvrage ».

En conséquence, la Cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que la société requérante avait droit aux intérêts moratoires contractuels quarante-cinq jours après la réception par la commune de sa réclamation contre le décompte général (CE, 13 avril 2018, n° 402691).


Mutualisation de marchés publics

Une réponse ministérielle indique que lorsque des communes souhaitent recourir à la mutualisation de marchés publics, la convention constitutive de groupement, qui ne constitue pas un marché public, doit être approuvée par chaque conseil municipal en application des dispositions de l’article L. 2122-22 du CGCT (Rép. min. n° 1634 : JOAN 12 juin 2018, p. 4993).


Indemnisation du manque à gagner du titulaire d’un marché résilié

Lorsque le juge est saisi d’une demande d’indemnisation du manque à gagner résultant de la résiliation unilatérale d’un marché public pour motif d’intérêt général, il lui appartient, pour apprécier l’existence d’un préjudice et en évaluer le montant, de tenir compte du bénéfice que le requérant a, le cas échéant, tiré de la réalisation, en qualité de titulaire ou de sous-traitant d’un nouveau marché passé par le pouvoir adjudicateur, de tout ou partie des prestations qui lui avaient été confiées par le marché résilié.

Dans l’hypothèse où, à la date à laquelle le juge statue sur le litige relatif à la résiliation, il résulte de l’ensemble des circonstances particulières de l’espèce, que, alors même qu’il n’a pas exécuté de telles prestations dans les conditions mentionnées ci-dessus ou que leur exécution n’est pas en cours, le titulaire du marché résilié est susceptible d’être chargé, dans un délai raisonnable, de tout ou partie de ces prestations à l’occasion d’un nouveau marché, il appartient au juge de surseoir à statuer sur l’existence et l’évaluation du préjudice né de la résiliation (CE, 26 mars 2018, n° 401060).


Qualification de concession d’un contrat de mobilier urbain

Pour le Conseil d’Etat, le contrat dont l’objet est l’installation, l’exploitation, la maintenance et l’entretien de mobiliers urbains destinés notamment à l’information municipale est un contrat de concession

Pour qualifier un tel contrat de concession, le Conseil d’Etat se fonde sur le fait que :

  • Le titulaire du contrat devait assurer ces prestations à titre gratuit et était rémunéré par les recettes tirées de la vente d’espaces à des annonceurs publicitaires ;
  • Le contrat ne comportait aucune stipulation prévoyant le versement d’un prix à son titulaire, lequel était exposé aux aléas de toute nature qui peuvent affecter le volume et la valeur de la demande d’espaces de mobilier urbain par les annonceurs publicitaires sur le territoire de la commune, sans qu’aucune stipulation du contrat ne prévoie la prise en charge, totale ou partielle, par la commune des pertes qui pourraient en résulter.

Ainsi, l’attributaire s’étant vu transférer un risque lié à l’exploitation des ouvrages à installer, le contrat constitue un contrat de concession (CE, 25 mai 2018, n° 416825).


La régularisation d’une offre est une simple faculté

Pour le Conseil d’Etat, il ressort des dispositions de l’article 59 du décret du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics que dans les procédures d’appel d’offres, l’acheteur peut autoriser tous les soumissionnaires dont l’offre est irrégulière à la régulariser, dès lors que cette dernière n’est pas anormalement basse et que la régularisation n’a pas pour effet d’en modifier les caractéristiques substantielles.

Pour autant, il précise qu’il ne s’agit que d’une faculté et non d’une obligation (CE, 21 mars 2018, n° 415929).


Dans un arrêt du 25 mai 2018, le Conseil d’Etat rappelle l’étendue du contrôle opéré par le juge du référé précontractuel en matière d’allotissement.

Il énonce qu’« il appartient au juge du référé précontractuel de déterminer si l’analyse à laquelle le pouvoir adjudicateur a procédé et les justifications qu’il fournit sont, eu égard à la marge d’appréciation dont il dispose pour décider de ne pas allotir lorsque la dévolution en lots séparés présente l’un des inconvénients que les dispositions précitées mentionnent, entachées d’appréciations erronées ; que, par ailleurs, lorsqu’un marché public a été alloti, le juge ne peut relever un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence du fait de la définition du nombre et de la consistance des lots que si celle-ci est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation, compte tenu de la liberté de choix dont le pouvoir adjudicateur dispose en ce domaine » (CE, 25 mai 2018, n° 417428, Office public de l’habitat Hauts-de-Seine Habitat).


Démission d’office d’un conseiller municipal : quel délai pour saisir le Tribunal administratif ?

La Cour administrative d’appel de Marseille précise que le délai prescrit par l’article R. 2121-5 du CGCT est franc. Autrement dit, le maire qui souhaite démettre de ses fonctions un conseiller municipal qui refuse d’exercer une de ses fonctions dispose d’un délai d’un mois pour saisir le Tribunal administratif, ce délai commençant à courir le lendemain de la déclaration de refus du conseiller municipal d’exercer ladite fonction (CAA Marseille, 27 novembre 2017, n° 17MA03900).


L’absence de recouvrement par l’Etat de taxes au profit d’une collectivité territoriale engage sa responsabilité !

Dans un arrêt du 22 décembre 2017, le Conseil d’Etat a jugé qu’ « une faute commise par l’administration lors de l’exécution d’opérations se rattachant aux procédures d’établissement ou de recouvrement de l’impôt est de nature à engager la responsabilité de l’Etat à l’égard d’une collectivité territoriale ou de toute autre personne publique si elle lui a directement causé un préjudice. Un tel préjudice peut être constitué des conséquences matérielles des décisions prises par l’administration et notamment du fait de ne pas avoir versé à cette collectivité ou à cette personne des impôts ou taxes qui auraient dû être mis en recouvrement à son profit ».

Dans une telle hypothèse, le  montant du préjudice indemnisable doit être calculé en prenant en compte, le cas échéant, les sommes effectivement perçues par la collectivité territoriale ou la personne publique au titre d’un mécanisme de compensation par l’Etat de ses pertes de recettes mis en œuvre à tort (CE, 22 décembre 2017, n° 385864, Ministre des finances et des comptes publics).